Alors que dans les pays scandinaves et au Canada plus de 80% de la population est formée aux gestes de premiers secours, cette proportion n’est que de 40% en France. Or, les chances de survie sont décuplées lorsque les bons gestes – souvent simples – peuvent être apportés rapidement, par exemple en cas d’accident ou d’arrêt cardiaque.

Face à ce déficit, à la suite des attentats de 2015, la France a déclaré en 2016 « Grande cause nationale » la formation aux gestes de premiers secours. De nombreuses sessions sont ainsi proposées au grand public par les sapeurs-pompiers, la Croix-Rouge, la protection civile ou des associations. Et des propositions sont en cours pour faire de ces « gestes qui sauvent » un réflexe citoyen dès le plus jeune âge.

Conférence du Dr Guillaume Bouhours

Conférence animée par le Docteur Guillaume Bouhours, responsable de l’unité Anesthésie-Urgences-Déchocage du CHU d’Angers.

Porter secours, un acte citoyen

L’obligation de porter secours est inscrite dans la loi, qui précise notamment depuis 2004 que « Toute personne concourt, par son comportement, à la sécurité civile. En fonction des situations auxquelles elle est confrontée et dans la mesure de ses possibilités, elle veille à prévenir les services de secours et à prendre les premières dispositions nécessaires ».

Chacun de nous a donc le devoir d’intervenir lorsqu’il est confronté à une situation d’urgence : au minimum prévenir les secours, et porter assistance aux personnes si l’on en a les compétences (ou en étant guidé au téléphone par un professionnel des secours).

Malheureusement, les Français ne sont pas bien formés aux gestes de premiers secours.
Selon les études, 25 à 40 % des Français ont reçu une initiation ou une formation, et seulement 1 sur 5 se déclare prêt à effectuer un massage cardiaque. Proportion bien faible au regard de nos voisins (Norvège : 95 % - Autriche : 80 % - Grande-Bretagne : 80 %). La France est l’un des pays les moins bien formés d’Europe.

Cela s’explique peut-être par l’absence d’une politique réellement volontariste pour former les citoyens, mais aussi, paradoxalement, parce que nous nous reposons sur l’efficacité de notre système d’intervention de secours (pompiers - SAMU) et sous-estimons l’importance des gestes appliqués dans les toutes premières minutes.

Le témoin, premier acteur de la chaîne de survie

Au-delà des situations exceptionnelles (attentat, catastrophe naturelle), chaque année en France, une personne sur cinq est victime d’un accident de la vie courante. Ces accidents surviennent dans tous les champs de la vie quotidienne : à la maison, au sport, au travail, sur la route, en vacances... Ils représentent 20 000 décès par an et sont la première cause de décès chez les jeunes de moins de 15 ans.

Chacun d’entre nous peut donc être témoin, à tout moment, d’une situation d’urgence. Or, les premiers gestes effectués en attendant l’arrivée des secours ont un impact majeur sur les chances de survie de la personne. Le témoin constitue donc un maillon essentiel de la « chaîne de survie ». Savoir comment (ré)agir permet vraiment de sauver des vies !

Exemple : l’arrêt cardiaque

En France, 40 000 arrêts cardiaques sont comptabilisés chaque année, 7 fois sur 10 devant un témoin. La plupart du temps, ce témoin alerte les secours puis patiente sans intervenir davantage. Or, dès la cinquième minute après l’arrêt cardiaque, chaque minute supplémentaire voit diminuer de 10 % les chances de faire repartir le cœur. En un quart d’heure, les chances de pouvoir réanimer la personne sont devenues quasi nulles.

Les statistiques parlent d’elles-mêmes : si rien n’est fait dans les premières minutes, le taux de survie à l’arrivée des secours est de 2 %. Si un massage cardiaque est effectué, ce taux monte à plus de 30 %. Et il dépasse les 50 % si la défibrillation est appliquée conjointement au massage.

Des défibrillateurs ont été installés dans tous les lieux accueillant du public, devant toutes les mairies et les complexes sportifs. Ce sont des appareils automatiques, extrêmement simples à manipuler, et dont l’utilisation peut se faire en étant simplement guidé par téléphone.
Savoir comment (ré)agir permet de sauver des vies ! Ne nous contentons pas d’être des témoins, apprenons à être des témoins secouristes !

Une grande cause nationale

Les attentats de 2015 ont réveillé les consciences et entraîné une hausse très nette du nombre d’inscriptions aux formations aux gestes de premiers secours.

En 2016, le ministère de l’Intérieur a inscrit la formation aux gestes de premiers secours comme Grande cause nationale de santé publique et d’attitude citoyenne, et lancé la campagne d’information « Adoptons les comportements qui sauvent », supportée par trois grandes organisations de secours : les sapeurs-pompiers, la Croix-Rouge et la protection civile.

Une session de 2 heures, gratuite, a été mise au point et ouverte à tous sur le territoire national. Elle permet de s’initier aux gestes essentiels : l’alerte, le massage cardiaque, l’utilisation du défibrillateur automatique, la pose d’un garrot en cas d’hémorragie, et l’attitude à adopter en cas d’attentat. 70 000 personnes ont ainsi été formées en 2016.

Au Danemark, des actions comparables ont permis de multiplier par trois le nombre de personnes sauvées.

Objectif : 80 % de la population formée aux gestes qui sauvent

Cet objectif est issu d’un rapport établi en 2017 par le médecin urgentiste Patrick Pelloux et le président des sapeurs-pompiers de France Eric Faure, sur la question « comment généraliser au plus grand nombre les gestes qui sauvent ».
Si cet objectif peut paraître ambitieux, rappelons qu’il consiste simplement à rattraper notre retard par rapport aux pays voisins.

Ce rapport comporte 27 propositions visant à former l’ensemble des citoyens, dès le plus jeune âge et tout au long de la vie, afin d’imprimer cette culture du premier secours comme un acte de défense civile.
Parmi elles :

  • Intégrer les premières formations au parcours scolaire, avec une initiation dès les petites classes
  • Démocratiser la formation à travers des sessions courtes et accessibles
  • Rendre la certification de niveau 1 obligatoire dans la fonction publique, mais aussi dans certaines professions
  • Renouveler la formation à plusieurs moments-clés de la vie : par exemple lors du passage du permis de conduire, à l’occasion d’une période de chômage, etc.


L’Éducation Nationale s’est déjà engagée à former l’ensemble des élèves avant le secondaire : le massage cardiaque est un geste simple, accessible dès l’âge de 12 ans. Cette démarche permettrait aussi de créer de l’émulation au sein des familles et de développer des valeurs de civisme utiles à la société.
 

Concrètement, comment se former ?

Il existe deux formations accessibles très facilement :

  • l’initiation gratuite de 2 heures, donnant lieu à la délivrance d’une attestation
  • la certification Prévention et Secours Civique de niveau 1 (PSC1) de 8 heures, accessible dès l’âge de 10 ans


Ces formations sont délivrées par les sapeurs-pompiers, la Croix-Rouge et de nombreuses associations de secourisme dont les coordonnées sont consultables sur internet.

Il est bien évidemment possible d’approfondir ses connaissances en allant plus loin dans le parcours de formation.

Divers outils numériques ont également été développés : applications ludiques pour tester et entretenir ses connaissances, mais aussi applications utiles comme Staying Alive ou Sauv’Life, qui permettent en cas de besoin de géolocaliser et alerter les personnes formées au secourisme présentes à proximité, et de localiser le défibrillateur le plus proche.

Enfin, ne pas négliger la prévention : installer des détecteurs d’incendie, des dispositifs anti- noyade... tout ce qui peut contribuer à éviter l’accident, doit aussi être considéré comme un « geste qui sauve » ! De nombreux supports d’information sur la prévention sont disponibles auprès des organismes de secours, de protection sociale, d’assurance, etc. 

L'Unité Anesthésie-Urgences-Déchocage du CHU d'Angers

L’unité Anesthésie-Urgences-Déchocage du CHU d’Angers assure l’anesthésie des patients sur l’ensemble des blocs opératoires du CHU, la réanimation au sein de trois unités de réanimation chirurgicale, et la prise en charge des patients traumatisés grave en salle de déchocage.

Elle effectue chaque année près de 20 000 consultations et 2 500 hospitalisations.

 

Impliquée dans le dispositif Trauma System, l’unité participe également à l’optimisation de la prise en charge des patients traumatisés à l’échelle du territoire local, aux côtés des Centres Hospitaliers de Cholet, Saumur et Laval.