L’équipe du Département de Médecine d’Urgence du CHU et de l’Université d’Angers en collaboration avec 15 centres de France et de Belgique, a conduit un essai évaluant l’impact d’une stratégie ciblée de prescription d’un traitement anticoagulant préventif chez les patients ayant un traumatisme d’un membre inférieur nécessitant une immobilisation.

Les résultats de cette étude coordonnée par le Dr Douillet, ont fait l’objet d’une publication le 16 février 2024 dans la revue scientifique The Lancet.

Les patients ayant un traumatisme d’un membre inférieur nécessitant une immobilisation par plâtre, résine ou attelle sont très fréquents en France (environ 10000 par jour). Ils ont un risque augmenté de développer une thrombose veineuse profonde (phlébite) ou une embolie pulmonaire. Ce risque reste cependant globalement faible (2%) et il est très variable en fonction des personnes. Les patients ayant un traumatisme constitue en effet un groupe très hétérogène allant de l’entorse de cheville chez un jeune sportif à une fracture immobilisée par plâtre chez une personne âgée. Un traitement anticoagulant par injection quotidienne a démontré son efficacité mais le prescrire à tout le monde était discutable. L’équipe d’Angers a participé à l’élaboration du score TRiP(cast) permettant d’estimer le risque de thrombose en tenant compte du type de traumatisme et d’immobilisation et des caractéristiques des patients [1].

Dans cette étude, l’équipe a évalué l’impact de la stratégie de prescription d’anticoagulant préventif guidée par le score TRiP(cast).

L'essai CASTING a été financé par un PHRC interrégional et mené dans 15 services d’urgence de France et de Belgique ; 2120 patients ont été inclus entre le 16 juin 2020 et le 15 septembre 2021.

Les centres participants étaient randomisés pour l’ordre de passage d’une phase observationnelle à une phase interventionnelle. Lors de la phase observationnelle, les patients recevaient une anticoagulation préventive selon la pratique habituelle du praticien ou du centre. Lors de la phase interventionnelle, seuls les patients ayant un score TRiP(cast) supérieur ou égal à 7 recevaient une anticoagulation préventive.

Le critère de jugement principal était le taux de survenue d’événements thromboemboliques veineux (phlébite et/ou embolie pulmonaire) dans le groupe des patients à faible risque (score TRiP(cast) < 7) ne recevant pas d’anticoagulation préventive. Le seuil de sécurité était fixé inférieur à 1% avec une borne supérieure de l’intervalle de confiance à 2%. Le critère de jugement secondaire principal était la comparaison du taux d’anticoagulation entre les deux phases.

Chez les patients à faible risque qui n’étaient pas traités par anticoagulant, un évènement thromboembolique est survenu dans 0.7% des cas, un taux significativement inférieur à la borne de sécurité, et, comparativement à la phase contrôle, l’application du score TRiP(cast) a permis une réduction de la prescription d’anticoagulation préventive de 26%.

Cet essai randomisé a montré la sécurité de ne pas prescrire d’anticoagulation préventive chez les patients à bas risque selon le score TRiP(cast). Cette stratégie a conduit à une réduction significative du taux d’anticoagulation préventive, les ¾ des patients pouvant sursoir sans risque à une injection quotidienne d’anticoagulant.

Cette démarche s’intègre dans une stratégie de désescalade individualisée et de juste soin pour les patients.

 [1] Le score TRiP(cast) comprend 14 variables. Il a été développé et validé rétrospectivement en collaboration avec l’équipe de Leiden aux Pays-Bas.

 

 

 


Publié le 26 février 2024 Mis à jour le 26 février 2024