Chaque année en France, plus de 200 000 personnes sont hospitalisées pour infarctus du myocarde ou insuffisance cardiaque. Ces pathologies concernent 1 à 2% de la population, le risque d'être touché augmente fortement avec l’âge. Au cours des dernières décennies, de nombreux progrès en matière de traitement et de chirurgie ont permis de faire reculer la mortalité des maladies cardiaques. Cependant pour certains patients âgés ou fragiles, une intervention chirurgicale reste trop risquée. C’est pourquoi de nouvelles options de traitement ont été mises au point, afin de « rajeunir le cœur » sans recourir à la chirurgie.

Conférence du Dr Frédéric Rouleau

Conférence animée le 8 novembre 2016 par le Dr Frédéric Rouleau, cardiologue au CHU d’Angers.
Rendez-vous organisé dans le cadre des Mardis de la santé, en partenariat avec la Ville d'Angers et le Courrier de l'Ouest.

Un capital à préserver

Le muscle cardiaque est particulier car, contrairement à d’autres organes, il ne se régénère pas. Le nombre de cellules dont il est constitué est donné dès la naissance et n’évoluera pas. Notre « capital cœur » est fixe une fois pour toutes, il faut donc y faire attention.
Bien sûr, avec l’âge, le cœur va inévitablement vieillir. Mais un certain nombre de facteurs peuvent provoquer l’accélération de ce vieillissement. Ces facteurs de risque cardio-vasculaire ont été mis en évidence dans les années 1970 par une étude de cohorte menée depuis 1948 – et toujours en cours – sur plusieurs générations d’habitants de la ville de Framingham, dans le Massachusetts aux Etats-Unis.

Épidémiologistes et statisticiens ont ainsi constaté que le tabac, l’hypertension artérielle, le diabète, le cholestérol, la sédentarité et l’inactivité physique accélèrent le vieillissement du cœur. Il est donc fondamental de comprendre que nous pouvons maintenir notre cœur en bon état et retarder son vieillissement en adoptant les bonnes mesures de prévention et de mode de vie.

Cependant, lorsqu’une pathologie survient, se pose la question du traitement. Dans le cas où une intervention chirurgicale classique ne peut être envisagée, d'autres solutions existent, comme celles détaillées ci-dessous. Ces méthodes de traitement non chirurgicales sont adaptées à chaque type de pathologie.

L’angioplastie trans-coronaire : réparer les vaisseaux et protéger le muscle

L’artériosclérose est une maladie coronaire qui induit des rétrécissements des vaisseaux internes du cœur, qui peu à peu se bouchent et se rétrécissent. Le muscle cardiaque n’étant plus alimenté, il se nécrose et cesse de se contracter. Cette pathologie se traduit par une douleur d’effort – ce que l’on appelle « angine de poitrine » – et conduit à des infarctus.
 
Ce que l’on peut faire sans opérer le cœur :

Des traitements médicamenteux efficaces débouchent les coronaires ou évitent que les lésions ne progressent au niveau de l’artère. Si besoin, une technique interventionnelle sans chirurgie, l’angioplastie, permet de régénérer une artère en posant par voie interne, c'est à dire en passant par le système vasculaire depuis l'aine, un stent (petit tube en ressort) ou un ballonnet qui va reconstituer son diamètre. Dans tous les cas, la prise en charge du patient doit être rapide pour préserver au mieux le muscle cardiaque.

La valve TAVI : remplacer la valve aortique

Le cœur est constitué de plusieurs « chambres », les oreillettes et ventricules, entre lesquelles des « clapets » – les valves – assurent la circulation du sang dans le bon sens. L’une des principales valves, la valve aortique, a tendance à se calcifier avec l’âge. Ce processus de dégénérescence progressive, aggravée par les facteurs de risque évoqués précedemment, entraîne une diminution de la surface d’ouverture de la valve. Le cœur va « pousser » contre l’obstacle pour compenser, et s’altérer rapidement. Cette pathologie se caractérise par des douleurs thoraciques, un essoufflement, voire des syncopes à l’effort.

Ce que l’on peut faire sans opérer le cœur :

Même s’il est bien maîtrisé depuis les années 1960, le remplacement de la valve aortique par une valve artificielle reste une opération de chirurgie assez lourde. Pour les patients trop âgés ou présentant des contre-indications, la solution non chirurgicale consiste à passer par les artères pour acheminer et poser une valve artificielle, qui se déploie au milieu de la valve calcifiée et la remplace. Cette pose de valve TAVI – développée par des équipes françaises en 2002 – est une intervention beaucoup plus légère. Elle s’effectue en salle hybride (salle d’intervention où travaillent simultanément plusieurs médecins : anesthésiste, cardiologue, échographiste, chirurgien si besoin - voir photo ci-dessous). Le patient ne reste que 48 à 72 heures à l’hôpital, et ressort avec une simple cicatrice au niveau de l’aine. L’effet positif est instantané.

Le clip mitral : réparer la valve mitrale

Située dans le ventricule gauche, la valve mitrale présente la particularité d’être maintenue par des haubans, des sortes de câbles qui maintiennent ses deux membranes l’une en face de l’autre. Il peut arriver que l’un des haubans casse ou qu’une déformation du ventricule, par exemple suite à un infarctus, restreigne un hauban et laisse la valve trop ouverte en permanence. Les deux feuillets n’étant plus jointifs, la valve fuit et du sang reflue dans le mauvais sens, vers l’oreillette.

Ce qu’on peut faire sans opérer le cœur :

Pour les patients dont l'état de santé ne permet pas une chirurgie, il est possible d’installer par voie veineuse un clip qui pince les deux feuillets et les maintient l’un en face de l’autre. Le diamètre de passage du sang est réduit, mais selon une valeur d’acceptation qui ne gênera pas le patient. Cette technique innovante permet au patient, comme pour la pose de valve TAVI, de ne subir qu’une petite incision à l’aine et de regagner son domicile au bout de quelques jours. Cette intervention est réalisée également dans une salle hybride (photo ci-dessus).

La fermeture des auricules : éviter la prolifération des caillots

Avec le vieillissement cardiaque, l’oreillette gauche peut faire de l’arythmie et ne plus contracter correctement. Le sang va alors circuler moins vite dans certaines parties du cœur, en particulier l’auricule gauche, qui constitue une excavation sans utilité (comparable à l’appendice dans l’intestin). Or ce flux ralenti favorise la formation de caillots, qui risquent s’ils se déplacent, d’entraîner des AVC.

Ce que l’on peut faire sans opérer le cœur :

Relativement fréquente, cette pathologie est généralement traitée par anticoagulants. En cas de contre-indication (hémorragies digestives par exemple), l’autre possibilité consiste à poser par voie veineuse une sorte de « parapluie » sur l’auricule, afin de l’obstruer et empêcher les éventuels caillots de sortir. Cette solution permet d’arrêter les anticoagulants.

Perspectives : vers une prise en charge de plus en plus performante techniquement

La cardiologie a connu des progrès spectaculaires depuis la création des premières unités de soins intensifs dédiés, dans les années 1970. La chirurgie reste bien sûr une arme extrêmement efficace, mais les nouveaux modes d’intervention qui apparaissent depuis une dizaine d’années sont très prometteurs. Nul doute que l’évolution des modes de prise en charge, la miniaturisation des sondes et du matériel implanté, leur facilité de mise en place et d’utilisation n’en sont encore qu’aux premiers balbutiements !

Le CHU d’Angers, à la pointe en matière de cardiologie

La pose de valve TAVI s’effectue de façon courante au CHU d’Angers, où près de 800 patients ont été opérés depuis 2009.  La première pose de clip mitral au CHU d’Angers a été réalisée en 2013.
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